Alors que les entreprises se préparent à se conformer aux nouvelles exigences, il est important d’explorer également l’impact de la CSRD sur les ressources humaines (RH) et comment les départements RH peuvent jouer un rôle clé dans cette transition.
Qu’est-ce que la CSRD ?
La CSRD représente une avancée significative par rapport à la directive précédente sur le reporting non financier (NFRD). Elle élargit le champ d’application des exigences de reporting à un plus grand nombre d’entreprises, notamment celles cotées en bourse, mais aussi les grandes entreprises non cotées, et même certaines PME*. L’objectif est d’améliorer la transparence en matière de performance environnementale, sociale et de gouvernance (ESG).
Objectifs de la CSRD
- Transparence accrue : Les entreprises devront fournir des informations détaillées sur leurs impacts environnementaux et sociaux, ainsi que sur leurs pratiques de gouvernance.
- Responsabilité sociale : La CSRD vise à renforcer la responsabilité des entreprises envers leurs parties prenantes, y compris les employés, les clients et les communautés locales.
- Conformité aux standards internationaux : Les entreprises seront tenues de se conformer à des normes de reporting harmonisées, facilitant ainsi la comparabilité des données.
L’Impact direct sur les Ressources Humaines
La mise en œuvre de la CSRD aura des répercussions profondes sur les départements RH. Voici quelques-unes des principales dimensions à considérer :
Révision des politiques RH
Les entreprises devront réévaluer leurs politiques RH pour les aligner sur les critères ESG. Cela implique :
- Égalité et inclusion : Les entreprises devront démontrer leur engagement à promouvoir l’égalité des sexes, la diversité et l’inclusion au sein de leur personnel.
- Conditions de travail : La CSRD exige des entreprises qu’elles rapportent sur les conditions de travail, ce qui nécessite une révision des pratiques en matière de santé et de sécurité au travail.
Formation et sensibilisation
Pour se conformer aux nouvelles exigences, les équipes RH devront investir dans la formation et la sensibilisation des employés. Cela inclut :
- Programmes de formation ESG : Les employés doivent être formés sur les enjeux ESG, les politiques de l’entreprise et leur rôle dans la mise en œuvre de ces initiatives.
- Culture d’entreprise : Promouvoir une culture d’entreprise axée sur la durabilité, où chaque employé se sent impliqué et responsable.
Recrutement et rétention
Les critères ESG influenceront également les stratégies de recrutement et de rétention des talents :
- Attractivité pour les talents : Les entreprises qui intègrent des pratiques durables et socialement responsables attireront de plus en plus de candidats, notamment parmi les générations Y et Z, qui privilégient des employeurs engagés.
- Fidélisation des employés : Un environnement de travail positif et des politiques responsables contribuent à améliorer la satisfaction et la fidélité des employés.
Évaluation et reporting des performances
L’un des grands défis pour les départements RH sera de mettre en place des systèmes d’évaluation et de reporting des performances en matière de durabilité :
- Indicateurs de performance (KPIs) : Les RH doivent développer (s’ils n’existent pas déjà) des KPIs spécifiques pour mesurer l’impact des initiatives ESG sur le personnel, tels que le taux de rotation (turnover), l’engagement des employés et la satisfaction au travail.
- Reporting et transparence : Les données collectées devront être intégrées dans le reporting global de l’entreprise, conformément aux exigences de la CSRD.
Défis à surmonter
L’implémentation de la CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive) n’est pas sans défis. En effet, plusieurs obstacles majeurs peuvent entraver les départements des ressources humaines (RH) dans leur quête d’une intégration efficace des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) au sein de l’entreprise.
Manque de connaissances et de compétences
L’un des premiers obstacles à l’implémentation de la CSRD réside dans le manque de connaissances et de compétences spécifiques parmi les équipes RH. De nombreuses entreprises, en particulier les PME, peuvent ne pas disposer de l’expertise requise pour naviguer dans le paysage complexe des critères ESG. Cela peut entraîner une incompréhension des exigences réglementaires, ainsi qu’une incapacité à formuler des stratégies efficaces pour les appliquer. Pour pallier ce manque, il devient essentiel que les départements RH investissent dans le développement des compétences de leurs équipes. Cela peut se traduire par des formations ciblées, l’externalisation de l’expertise via des cabinets de conseils, ou encore des partenariats avec des organisations spécialisées en durabilité. En renforçant leurs connaissances, les équipes RH pourront mieux conseiller et accompagner les autres départements dans l’atteinte des objectifs ESG.
Résistance au changement
La transition vers des pratiques durables peut être perçue comme une menace par certains collaborateurs, engendrant ainsi une résistance au changement. Cette résistance peut découler de la peur de l’inconnu, de l’attachement aux méthodes traditionnelles ou d’une perception erronée des enjeux liés à la durabilité. Les départements RH ont un rôle crucial à jouer en tant que facilitateurs du changement. Ils doivent élaborer des stratégies de communication efficaces pour sensibiliser et « éduquer » les collaborateurs sur l’importance des pratiques durables et de la CSRD. En les intégrant dans le processus de changement, en écoutant leurs préoccupations et en valorisant leurs contributions, les RH peuvent favoriser une culture d’acceptation et d’engagement envers les nouvelles politiques. La mise en place de programmes de reconnaissance pour les initiatives durables peut également encourager une adoption plus rapide et enthousiaste des changements requis.
Intégration des données
Un autre défi majeur réside dans l’intégration et la gestion des données relatives aux performances ESG. La collecte et l’analyse de ces données nécessitent des systèmes d’information robustes et performants. Les départements RH doivent donc collaborer étroitement avec les équipes informatiques pour mettre en place des outils adaptés qui permettent non seulement de recueillir les données nécessaires, mais aussi de les analyser de manière efficace. Cela peut inclure l’utilisation de logiciels de gestion des performances ESG, de plateformes de reporting et d’analytique avancée… ou un SIRH efficace.
De plus, la mise en place de processus standardisés pour la collecte de données à travers l’ensemble de l’organisation est essentielle pour garantir la cohérence et la fiabilité des informations. En intégrant des systèmes de reporting efficace, les départements RH pourront fournir des rapports précis et transparents sur les performances ESG, contribuant ainsi à la conformité avec la CSRD et à l’amélioration continue des pratiques durables au sein de l’entreprise.
Solutions pour un alignement sur la CSRD
Pour réussir cette transition, les départements RH peuvent adopter plusieurs stratégies :
Élaboration d’une stratégie ESG
Les entreprises doivent développer une stratégie ESG (Environnementale, Sociale et de Gouvernance) claire, intégrant les objectifs sociaux et environnementaux dans leur vision à long terme. Par exemple, une entreprise pourrait définir des objectifs de réduction des émissions de carbone de 30 % d’ici 2030, développer des programmes de diversité et d’inclusion au sein de leurs équipes, ou encore s’engager à utiliser des matériaux durables dans leurs processus de production.
Une bonne pratique consiste à réaliser un audit interne pour identifier les domaines d’amélioration et à impliquer les parties prenantes dans l’élaboration des objectifs afin d’assurer leur pertinence et leur acceptabilité.
Collaboration interdépartementale
La mise en œuvre des exigences de la CSRD nécessite une collaboration étroite entre les départements RH, finance, communication et RSE. Par exemple, les équipes RH pourraient travailler avec le département finance pour évaluer le coût des initiatives ESG et leur impact sur le bilan de l’entreprise, tout en s’assurant que la communication sur ces initiatives est cohérente et alignée avec les valeurs de l’entreprise. Des ateliers interservices réguliers peuvent être organisés pour partager les progrès, identifier les défis et trouver des solutions ensemble.
Une bonne pratique serait de créer un groupe de travail interdépartemental dédié à la CSRD, avec des représentants de chaque département pour superviser et coordonner les efforts.
Engagement des parties prenantes
Les RH doivent encourager l’engagement des parties prenantes, notamment les employés, les clients et les fournisseurs, dans le développement et l’implémentation des initiatives ESG. Par exemple, des enquêtes de satisfaction ou des groupes de discussion peuvent être organisés pour recueillir les retours des employés sur les politiques de durabilité de l’entreprise. En outre, impliquer les clients dans des initiatives de cocréation, comme des projets de développement durable ou des actions de responsabilité sociale, peut renforcer la fidélité à la marque. Une bonne pratique consiste à établir des partenariats avec des ONG ou des initiatives locales pour impliquer les fournisseurs et les clients dans des projets communs, tout en renforçant la visibilité des efforts ESG de l’entreprise.
Suivi et évaluation continus
Il est important de mettre en place des mécanismes de suivi et d’évaluation pour mesurer l’impact des initiatives ESG et ajuster les stratégies en conséquence. Par exemple, une entreprise pourrait utiliser des indicateurs clés de performance (KPI) pour suivre les progrès réalisés dans la réduction des déchets ou l’amélioration de la diversité au sein des équipes. Des rapports réguliers, à la fois internes et externes, peuvent être publiés pour rendre compte de ces progrès et des défis rencontrés.
Une bonne pratique serait d’adopter un logiciel de gestion de la durabilité qui permet de centraliser les données, d’analyser les performances et de générer des rapports conformes aux exigences de la CSRD, facilitant ainsi la transparence et la responsabilité.
Conclusion
La CSRD représente une opportunité unique pour les départements RH de jouer un rôle central dans la transformation durable des entreprises. En intégrant les critères ESG dans leurs pratiques, les RH peuvent non seulement répondre aux exigences réglementaires, mais aussi contribuer à construire une culture d’entreprise plus responsable et engagée.
À l’horizon 2025, il est crucial pour les entreprises de se préparer à ces changements pour assurer leur conformité et leur compétitivité. En s’adaptant aux nouvelles réalités imposées par la CSRD, les départements RH peuvent transformer les défis en opportunités, favorisant ainsi un avenir durable pour l’ensemble de l’organisation.
*Les entreprises concernées par la CSRD :
- Les entreprises cotées sur les marchés réglementés européens dont les PME.
- Les entreprises non-cotées excédant l’un des indicateurs suivants : 250 salariés, 40 Millions d’euros de chiffre d’affaires et/ou 20 millions de total de Bilan.
- Les entreprises européennes dont les filiales ou succursales réalisent un chiffre d’affaires supérieur à 150 millions au sein de l’Union Européenne.